Discours sur le colonialisme: suivi du Petit matin d'Aimé Césaire 1er Édition (2022)
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Description du livre Discours sur le colonialisme: suivi du Petit matin d'Aimé Césaire 1er Édition (2022):
Texte intégral révisé suivi du Petit matin d'Aimé Césaire par René Depestre. Publié en 1950, c'est-à-dire au sortir de la Seconde Guerre mondiale, pendant celle de Corée et peu avant celle d'Algérie, le pamphlet d'Aimé Césaire est non seulement l'un des plus grands textes fondateurs de l'anticolonialisme mais aussi un violent réquisitoire contre le capitalisme et la bourgeoisie européenne. L'auteur du Cahier d'un retour au pays natal, à l'époque député membre du Parti communiste, y dénonce avec force la barbarie de cette bourgeoisie occidentale décadente qui trouva un exutoire en colonisant les pays du tiers-monde au nom d'une "civilisation" soi-disant supérieure, soumettant les peuples à l'oppression et à la haine, à la violence et à la destruction, à l'exploitation et au pillage, au racisme et au fascisme. Avec ce vibrant acte d'accusation aujourd'hui entré dans l'Histoire, le fondateur du mouvement littéraire de la Négritude fait le procès implacable, toujours actuel, d'une Europe "indéfendable". À ceux qui sont aujourd'hui encore tentés de comptabiliser les aspects "positifs" de la colonisation, son pamphlet sonne comme un rappel.
.. Poursuivant mon analyse, je trouve que l'hypocricie est de date récente; que ni Cortez découvrant Mexico du haut du grand téocalli, ni Pizarre devant Cuzco (encore moins Marco Polo devant Cambaluc) , ne protestent d'être les fourriers d'un ordre supérieur; qu'ils tuent; qu'ils pillent; qu'ils ont des casques, des lances, des cupidités; que les baveurs sont venus plus tard; que le grand responsable dans ce domaine est le pédantisme chrétien, pour avoir posé les équations malhonnêtes :
( christianisme=civilisation; panganisme=sauvagerie), d'où ne pouvaient que s'ensuivre d'abominables conséquences colonialistes et racistes, dont les victimes devraient être les Indiens, les Jaunes, les N7gres ....
.... Il faudrait d'abord étudier comment la colonisation travaille à déciviliser le colonisateur, à l'abrutir au sens propre du mot, à le dégrader, à la violence, à la haine raciale, au relativisme moral, et montrer que, chaque fois qu'il y a au Viêt-nam une tête coupée et un œil crevé et qu'en France on accepte, un Malgache supplicié et qu'en France on accepte, il y a un acquis de la civilisation qui pèse de son poids mort, une égression universelle qui s'opère, une gangrène qui s'installe, un foyer d'infection qui s'étend et qu'au bout de tous ces traités violés, de tous ces mensonges propagés, de toutes ces expéditions punitives tolérées, de tous ces prisonniers ficelés et "interrogés", de tous ces patriotes torturés, au bout de cet orgueil racial encouragé, de cette jactance étalée, il y a un poison instillé dans les veines de l'Europe, et le progrès lent, mais sûr, de l'ensauvagement du continent
....(…) il vaudrait la peine (…) de révéler au très distingué, très humaniste, très chrétien bourgeois du XXe siècle qu’il porte en lui un Hitler qui s’ignore,(…) et qu’au fond, ce qu’il ne pardonne pas à Hitler, ce n’est pas le crime en soi, le crime contre l’homme blanc, c’est l’humiliation de l’homme en soi, c’est le crime contre l’homme blanc, c’est l’humiliation de l’homme blanc, et d’avoir appliqué à l’Europe des procédés colonialistes dont ne relevaient jusqu’ici que les Arabes d’Algérie, les coolies de l’Inde et les N7gres d’Afriques
Aimé CÉSAIRE,
extrait du livre
Discours sur le colonialisme.
5/5