1001Ebook » Nature, animaux et jardinage » L'île aux arbres disparus (2022)
  • Auteur: Elif Shafak
  • Editeur: ‎ Flammarion (12 janvier 2022)
  • Pages: 407 pages
  • Langue: Français

Description du livre L'île aux arbres disparus (2022):

Ce roman commence par un cri et s’achève par un rêve. Le cri, interminable, est celui que lance aujourd’hui une adolescente de seize ans, prénommée Ada, en plein cours d’histoire dans un lycée londonien.
Le rêve est celui d’une renaissance. Entre les deux a lieu la rencontre du Grec Kostas Kazantzakis et d’une jeune fille turque, Defne, en 1974, dans une Chypre déchirée par la guerre civile. Elif Shafak crée des personnages débordant d’humanité mais aussi de failles et de doutes, d’élans de générosité et de contradictions, pour conter l’histoire d’un amour interdit dans un climat de haine et de violence qui balaie tout sur son passage. Sa prose puissante convoque un savant mélange de merveilleux, de rêve, d’amour, de chagrin et d’imagination pour libérer la parole des générations précédentes, souvent réduites au silence.



Commentaires

Je connaissais Elif Shafak uniquement par son livre « La bâtarde d’Istanbul » que j’avais beaucoup aimé. Son dernier roman est juste une pure merveille et le meilleur moyen de bien commencer son année de lecture.

L’autrice se penche cette fois sur Chypre et son conflit résultant d’un processus raté de décolonisation. Mais elle ne se contente pas de retracer les événements qui ont bouleversé l’île depuis 1974. Non, elle fait bien plus. À travers l’histoire de Kostas et Defne, elle analyse ce qui fait naître un conflit mais bien plus encore le devoir de mémoire qui doit en résulter. Car tout conflit ne peut se résoudre que lorsque les différentes parties ont su mettre de côté les histoires partisanes et clivantes qui ont été élaborées en vue d’entretenir la haine. Chaque conflit crée de nombreuses histoires « officielles », celle des vainqueurs ayant souvent une ascendance sur les autres.

Mais Elif Shafak va plus loin. En plus de faire revenir les corps des disparus, à l’instar d’un Général de l’armée morte d’Ismail Kadare, elle ajoute à son histoire d’autres ingrédients pour mijoter un plat comme ceux qu’aime préparer tante Meryem. Les arbres ont une place prépondérante dans ce récit. Le figuier qui trône au milieu de la taverne où Kostas et Defne pouvaient se rencontrer à l’abri des regards rappelle le grenadier de Seul le grenadier de Sinan Antoon en ce qu’il est le témoin d’un conflit dont il conserve les histoires, souvent tristes. Et si le figuier se trouve ici dans un lieu de joie alors que le grenadier s’élevait dans la cour d’une morgue, leurs mémoires ne sont pas si différentes.

En utilisant les arbres et leurs spécificités à chacun, Elif Shafak réussit à créer des métaphores en lien avec le conflit chypriote et les conséquences sur ses habitants du Nord comme du Sud et les cicatrices qu’il a laissées, lesquelles se transmettent aux générations suivantes, même lorsqu’elles ont émigré. Le cri d’Ada, la fille de Kostas et Defne, est cet appel qui résulte d’une mémoire transgénérationnelle.



5/5