Pas de Chichis entre amies (2022)

Tout d’abord le décor est planté, dans la belle cité de Marseille, qui en devient presque un personnage de l’histoire à part entière! Je ne connais pas du tout cette ville, et pourtant les images me sont apparues très clairement, j’ai l’impression de connaître l’Estaque comme ma poche! Je ne sais pas si ces quartiers savamment décrits existent, mais j’espère vraiment que oui!! Ensuite vient le portrait de Alba, mère de famille divorcée, artiste déchue, qui n’a d’autre choix que de retourner vivre chez sa mère, suite à la banqueroute causée par son divorce. Elle débarque la queue entre les jambes, avec ses deux ados, pour louer l’appartement laissé libre par le décès de sa grand-mère, au 3ème étage de l’immeuble de Vittoria, sa maman, personnage haut en couleur, au langage bien fleuri, et la langue jamais dans sa poche!! Et heureusement qu’elle sera là, Vittoria, pour secouer les puces de sa fille, comme on dit, la bousculer dans ses retranchements, lui ouvrir les yeux, même contre son gré. S’ensuit une rencontre qui donnera le ton du récit, qui tour à tour nous émouvra, nous perturbera, nous fera voir rouge. Mais il est difficile de vous en dire plus sans vous dévoiler le fond de l’histoire
Du coup je vais vous parler des autres persos qui émaillent notre récit. Comment passer à côté des locataires de la Courée , Axel, Léo, Rosalinde, ou encore Fanny et son français bien particulier, qui n’auront de cesse de prendre soin de Alba, encore une fois bien malgré elle. On ne s’ennuie jamais dans cet antique immeuble aux tomettes bien cirées, tous ces hurluberlus nous feront rire ou pleurer, tel un ascenseur émotionnel bien rodé, mais on en redemande, la tendresse nous enveloppe, et on se prend à rêver d’avoir les mêmes voisins
Il ne faudra pas oublier le bel Armand, amoureux des arts, ( et de l’hygiène bucco-dentaire 😉), mais surtout sous le charme de notre Alba, qui encore une fois nous tendra le bâton pour se faire battre. En effet, il faut vous dire que Alba a pour habitude de se porter en perpétuelle victime, de se dévaloriser, du haut de ses quarante années bien sonnées, de ses formes voluptueuses gagnées à la faveur de ses deux grossesses. Elle porte sur sa propre personne un regard sans complaisance, on a souvent envie de la secouer, la rabrouer pour lui faire ouvrir les yeux sur la belle âme qu’elle est, sa générosité, son abnégation, son amour sans faille pour ses enfants.
Voilà de belles tranches de vies qui se croisent, s’entremêlent, se rapprochent pour mieux se déchirer. Notre petit cœur est sans cesse balloté entre rires , larmes, colère, angoisse. La pression ne cesse de monter, au fur et à mesure que le piège se referme sur Alba. Aura-t-elle le courage de se battre, de prendre les armes, de faire valoir ses droits?!? Pour le savoir, il vous faudra pousser la porte de la Courée, au cœur de Marseille, de vous laisser bercer par le mistral et par les mots de Laure, dont la plume enlevée et résolument moderne saura vous charmer, vous emporter, sans espoir de retour en arrière. Mais en a-t-on vraiment envie?!? Pas du tout, j’ai été très triste de devoir quitter notre belle héroïne et cette galeries de portraits, de refermer le livre et de me retrouver dans mon wagon de métro parisien !! Hâte de partir à la découverte des autres récits de cette auteure de grand talent.

5/5